Pourquoi et comment favoriser la diversité et l'inclusion dans le sport ? Réponses avec Michelle Cassaro, Directrice générale des Rosa Bonheur et présidente de l'association des Potes Âgé.e.s.

Michelle Cassaro a fait monter la Camargue, sa gaieté et sa gastronomie à Paris et en région parisienne. Durant l'été 2024, la guinguette Rosa Bonheur sur Seine a accueilli la Pride House et les athlètes LGBTQIA+ et leurs fans. Ses engagements en faveur du sport inclusif ne s'arrêtent pas à l'identité de genre et à l'orientation sexuelle. Car la question du bien vieillir, aussi, passe par le sport et la convivialité.

Pouvez-vous nous parler des guinguettes Rosa Bonheur ?

Ce sont des lieux où l'on boit, mange et danse. Je suis passionnée par la Camargue gardoise (Aigues-Mortes, Le-Grau-du-Roi, Saint-Laurent-d'Aigouze). J'ai voulu créer des ambassades du Midi, de la Camargue et de la bonne humeur. 

Aujourd'hui, il y a quatre guinguettes Rosa Bonheur à Paris et à Asnières-sur-Seine. La première est située historiquement dans le parc des Buttes-Chaumont. Avec le groupe Why Not, puis la Banque Publique d'Investissement (BPI) et Impala Investissement, nous avons ensuite créé Le Rosa Bonheur sur Seine et les Rosa Bonheur à l'Ouest et à l'Est.       

À l'origine de cette entreprise, il y a aussi votre engagement féministe et LGBTQIA+…

J'ai eu la chance d'avoir les clés d'un club à Paris, le Pulp, dans les années 90. D'abord lesbien, nous l'avons ouvert aux autres énergies autour du mouvement Queer. J'ai eu envie ensuite après d'un lieu en pleine nature, intergénérationnel et qui ferme plus tôt. D'où l'idée d'un super apéro, un lieu ouvert où chacun et chacune peut grignoter, se retrouver et se mélanger sans subir de discrimination.

Mon équipe et moi nous considérons comme des féministes. Pas si facile à gérer alors que nos portes sont ouvertes à tout le monde. On essaie de faire de l'éducation. 

Comment organisez-vous votre temps entre engagement et business ? 

Je ne distingue pas vraiment les deux dans mon emploi du temps. Le Rosa Bonheur sur Seine et la Fondation Fier Play, dont nous sommes très proches, ont accueilli la Pride Housesur le quai de Solferino et sur le bateau,durantl'été 2024. La Fondation Fier Play a monté cette fan zone et ce site totémique de la Ville de Paris. Elle a organisé des soirées DJ, des cours de sport et des retransmissions des compétitions dans un esprit de diversité et festif.C'était un lieu inclusif et bienveillant pour désinvisibiliser les athlètes LGBTQIA+ et contribuer à lutter contre les discriminations, dans le sport et dans la société au sens large. 

La Rosa Bonheur Modern Team (RBMT) est un autre de vos engagements en faveur du sport féminin, quel est son objectif ?

 

C'est une association  qui permet à tous ses adhérentes et adhérents de faire du sport en toute sécurité et sans subir de discriminations homophobes. Quel que soit son âge et son niveau de pratique. Nous promouvons une pratique du sport inclusive. Le sport loisir et les compétitions amateurs doivent être ouverts à tout le monde, quels que soit son identité de genre ou son orientation sexuelle. Notre équipe a d'ailleurs reçu le label FIER

Qu'est-ce que le label FIER ? 

Ce label permet de mesurer et améliorer le degré d'inclusion d'une structure sportive. Il s'agit ensuite de mettre en place des actions pour progresser en deux ans, sur la gouvernance, la visibilité en tant que structure LGBTQIA+ friendly, etc. Le sport a un caractère rassembleur et universel. Tout le monde est sur un terrain et joue ensemble. Le sport est moteur pour faire évoluer la société et changer les mœurs pour évoluer vers plus de tolérance. Nous sommes alliés, c'est-à-dire que nous voulons que le sport loisir soit ouvert à tout le monde. L'objectif est une pratique du sport universelle.

Comment cette aventure de la RBMT a-t-elle commencé ?   

Nous avons créé une équipe de football dans les années 90. Nous participions à un tournoi inter-établissements LGBT, avec le Banana Café, le Queen, le Pulp et nous, qui s'appelait « Talons et Crampons ». Nous sommes arrivées en finale la première année. Nous nous sommes dit : « L'année prochaine, on revient et on gagne ! ». Nous avons donc décidé de nous entraîner tous les dimanches, après avoir travaillé toute la nuit. Et on a gagné !

Pour pouvoir participer au tournoi international de Paris, qui est géré par la Fédération sportive LGBT+, nous avons ensuite créé une association : la RBMT.Lorsque nous avons participé aux Gay Games à Paris, en 2018, nous avons eu des médailles en course à pied et en tennis (mais pas en pétanque). Cela a été la plus grosse édition, avec 12 000 participants, 38 sports et autant de fêtes. C'est ainsi que la RBMT est devenue multisport. 

La RBMT a été créée en 1998, quelles activités propose-t-elle à ses membres en fonction de leur âge ?

La plupart des membres ont la cinquantaine. Ils se tournent donc vers des activités moins cardio que le foot et se mettent à la pétanque ou à la marche… Pour ma part, j'ai été gardienne de but dans la première équipe de foot. Ça a duré quelques années avant que je ne me trompe dans les plongeons et que je ne me blesse. Je me suis demandé comment rejouer et j'ai trouvé le ping-pong, qui est vraiment un sport pour les seniors, avec tout de même une certaine adrénaline. Nouveau jeu, nouveau challenge, nous allons devenir championnes de ping-pong à 80 balais !

Nous grandissons (et pas que) et nous vieillissons ensemble. Ça fait 20 ans que nous faisons du sport et des fêtes ensemble. Aujourd'hui, nous sommes moins axées sur la compétition, nous réfléchissons à des activités plus douces pour s'entretenir physiquement et avoir du lien social etc. Peu importe l'activité, l'important c'est de jouer et de s'amuser.

Vous voulez promouvoir une autre manière de vieillir, joyeuse et conviviale, à travers un projet d'habitat participatif senior inclusif, racontez-nous…

Avec un groupe de connaissances d'abord, et de manière plus structurée depuis trois ans, nous développons un projet d'habitat participatif senior intergénérationnel et inclusif via l'association des Potes Âgé.e.s de Rosa Bonheur. Nous imaginons et mettons en oeuvre des lieux de vie alternatifs pour retarder, voire éviter, l'entrée en Ephad dans toute la France. Nous accompagnons la naissance de ces lieux de vie co-construits et éco-responsables.

Il s'agit de rendre possible le « bien vivre et bien vieillir ensemble » en étant des super voisins. Ces lieux mêleront des espaces privés et communs, qui sont des lieux de convivialité, comme une guinguette, une salle de sport ou de cinéma. Et pourquoi pas, un potager ? Les groupes d'habitants se rencontrent par affinités autour de plusieurs activités comme le chant, le ciné-club ou la marche.

Certains membres de la RBMT, et des participants de chorales des guinguettes Rosa Bonheur, ont rejoint le projet. Frédérique Vidal, la présidente de la RBMT, qui a co-dirigé la Pride House durant l'été 2024, est à la tête du groupe Sport et Santé des Potes Âgé.e.s de Rosa Bonheur. À travers le partage de ces activités culturelles et sportives, et des lieux préservant l'inimité de chacun, nous permettons aux seniors de rester actifs et connectés avec le tissu local.